Le son fait également l'objet d'attentions particulières. Eric Alvergnat, aujourd'hui directeur d'une société de location de matériel sonore pour spectacles, fut de 1977 à 1997 l'ingénieur du son attitré de Barbara sur scène. " Elle était très exigeante tant pour la qualité du son que recevait la salle que pour ses retours. Les artistes ont tous devant eux ce que l'on appelle des bains de pieds, des hauts-parleurs qui leur envoient directement une balance parfois différente de ce qu'entendent les spectateurs. Tel chanteur veut entendre plus de basse, tel autre plus de sa voix ou moins de batterie. A cette époque, le son des retours se faisait du pupitre qui était au fond de la salle. ce qui était difficile pour les ingénieurs, placés comme ils l'étaient, d'imaginer ce que l'artiste entendait. De nos jours, les consoles de retour sont installées généralement sur les côtés de la scène, et le technicien entend quasiment la même chose que l'artiste.Pour chaque chanson, elle souhaitait un réglage différent. J'avais imaginé une astuce. J'avais fait installer sur son piano un petit bouton qui lui permettait, à la fin de chaque morceau, lorsque le noir se faisait, de couper le son de la salle. Elle pouvait ainsi continuer à me parler à l'aide de son micro de chant. Au début, cela fonctionnait très bien. Entre chaque titre, elle me demandait très vite une ou deux petites modifications. Mais peu à peu, ses demandes s'éternisèrent si bien que Jacques Rouveyrollis qui était aux lumières ne savait plus quand il fallait rallumer ! Elle parlait, s'agitait derrière son micro et les noirs en scène devenaient de plus en plus long ! J'ai alors inventé autre chose. Je lui ai construit une petite console, posée à côté d'elle sur un trépied, que les spectateurs ne pouvaient pas voir. Ainsi, entre chaque titre, elle pouvait opérer ses propres réglages. Comme elle était myope, qu'elle chantait sans lunettes, la console comportait de gros boutons fluorescents. La chanson terminée, elle commençait ses réglages pour la suivante. Sauf qu'en se penchant sur ce pupitre, on avait l'impression qu'elle piquait du nez, et comme cela durait, on pouvait penser qu'elle allait s'endormir ! Le vrai problème, c'est qu'elle était présente sur la scène dès qu'elle le pouvait, parfois même dans des conditions qui frisaient les limites de sécurité. Combien de fois, je l'ai vue, se balancer sur son rocking chair au milieu du plateau alors qu'autour d'elle, évoluaient, des dizaines de techniciens portant des projecteurs, des perches qui lui passaient au ras de la tête. Mais elle était comme ça, il lui fallait habiter le lieu. C'était une femme étonnante. "
Eric Alvergnat ( Ingénieur du son )