Tournées
( 1993 )
J'adore partir de ville en ville. Les traverser la nuit. Aller vers d'autres visages, imaginer toutes ces vies derrières les fenêtres allumées ou éteintes... Rouler, rouler... Découvrir le théâtre, retrouver le piano qui suit dans un camion, puis attendre le rocking-chair pendant que mon équipe installe la scène autour de moi, les rideaux, les lumières, le son ! Le spectacle, c'est vraiment là qu'il commence. A l'instant où les hommes déchargent les camions, dans un lieu quelquefois tellement insolite et que le public, le soir venu, rendra miraculeux.
Quand je quitte ma maison pour partir, c'est une coupure radicale. Je suis sur la route et je ne me retourne pas. Je regarde devant. Plus rien n'existe. Une autre vie, d'autres parfums, d'autres couleurs, d'autres silences... La vie, suspendue entre la scène et la route. Je deviens une voyageuse. Quand je reviens, je retrouve ma maison et mon secret.
Le premier endroit que je vois en arrivant dans une ville, c'est le théâtre. Mais si je ne vois pas le pays, je vois les gens du pays. Et je les vois comme personne ne les voit : rassemblés, silencieux, attentifs, présents, avec leurs bonheurs et leurs chagrins, riches ou pauvres, jeunes ou vieux...
A six heures du matin, je suis sur le terrain et je n'en bouge plus. Tout mon temps va se passer à vérifier la place du piano, la position de la lumière, etc. La soirée s'achève à une heure du matin et après je fais la route. Une fois que vous avez chanté dans une ville, vous n'avez plus rien à y faire. C'est là-bas, plus loin, qu'il faut aller.
Barbara