Mercredi 5 août 2009 à 8:42

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Sur le plateau de Frantz, Brel donne ses consignes à Levent, le directeur de la photographie : Léonie est laide..., il ne faut surtout pas adoucir les traits de Barbara, (...) Tu vois, de profil, avec son nez d'aigle, c'est ça que je veux !  Brel considère Barbara comme sa petite soeur, il ne la ménage pas. Quand il a quelque chose à dire, il ne s'en prive pas. Et Barbara est ravie ! Michel Ardant, le producteur de Frantz, ne cache pas sa réticence. Il aurait souhaité Annie Girardot, mais Brel est le patron. Réalisateur avisé, ce dernier impose Barbara. Dès les premiers jours de tournage, détendu et blagueur, il lui donne confiance  :  Bonjour la diva ! Tu vas voir, il y a des gens partout, comme lorsqu'on est en tournée...
Malgrè le voeu exprimé par Brel, Barbara ne parvient pas à être laide. Au contraire, le cadre des plages brumeuses lui sied et l'embellit, elle est magnifique de féminité et d'inconstance. Pendant le tournage, Brel invite  " ses femmes "  Barbara, Syvette Baudrot ( la scripte ), Daniele Evenou..., dans un restaurant près de Bruges. Souvenirs de Sylvette Baudrot  :
"  Barbara est myope comme une taupe. Dans la séquence où elle fait du vélo avec Brel le long du canal, elle part comme ça et c'est tout juste si on ne la  " récupére "  pas, elle va tout droit dans le canal, c'est très drôle ! Un jour, mes enfants me rejoignent sur le tournage. Barbara les adore. Mon fils a alors quatre ans et possède un petit kayak..., elle lui offre une paire de rames. A ma fille et à moi, elle donne deux pantalons assez particuliers, rayés bleus blancs rouges (!) on les gardera toujours. Sa sollicitude nous touche beaucoup. Jacques et Barbara s'entendent admirablement. Sur le plateau, elle ne porte jamais ses lunettes, elle se débrouille comme ça, au tâter. Dans la séquence du char à voile ce  stupide bateau à roulettes, sur la plage, Brel conduit, bien sûr, et Barbara est à ses côtés, confiante. Tout de même, quel étrange attelage ! L'ambiance que met Brel est extraordinaire. Parmi tous les metteurs en scène avec qui je travaillerai par la suite, je ne rencontrerai jamais une telle chaleur humaine. Un jour, il organise un dîner exclusivement avec les femmes de la production. Une autre fois, il réunit les hommes, seuls. Je suis là, Jacques dit de moi  :  Sylvette vient avec nous c'est un " mec " !  A la fin du repas au champagne entre femmes, il lance dans un grand rire  :   Maintenant, Mesdames, c'est à vous de m'offrir le café et le digestif !

Extrait du livre

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Extrait du film Frantz

Jeudi 30 juillet 2009 à 8:45



<  Le minotaure  >


Le minotaure  ( F.Wertheimer/Barbara )  ( 1973 )


Dans le grand labyrinthe où je cherchais ma vie,
Volant de feu en flamme comme un grand oiseau ivre
Parmi les dieux déchus et les pauvres amis,
J'ai cherché le vertige en apprenant à vivre

J'ai cheminé souvent, les genoux sur la terre,
Le regard égaré, embrouillé par les larmes
Souvent par lassitude, quelquefois par prière,
Comme un enfant malade, envoûté par un charme

Dans ce grand labyrinthe, allant de salle en salle,
De saison en saison, et de guerre en aubade
J'ai fait cent fois mon lit, j'ai fait cent fois mes malles,
J'ai fait cent fois la valse, et cent fois la chamade

Je cheminais toujours, les genoux sur la terre,
Le regard égaré, embrouillé par les larmes
Souvent par lassitude, quelquefois par prière,
Comme un enfant rebelle qui dépose les armes

Mais un matin tranquille, j'ai vu le Minotaure
Qui me jette un regard comme l'on jette un sort

Dans le grand labyrinthe où il cherchait sa vie,
Volant de feu en flamme, comme un grand oiseau ivre
Parmi les dieux déchus et les pauvres amis,
Il cherchait le vertige en apprenant à vivre

Il avait cheminé, les genoux sur la terre,
Le regard égaré, embrouillé par les larmes
Souvent par lassitude, quelquefois par prière,
Comme un enfant rebelle qui dépose les armes

Dans ce grand labyrinthe, de soleil en soleil,
De printemps en printemps, de caresse en aubaine
Il a refait mon lit pour de nouveaux sommeils,
Il a rendu mes rires et mes rêves de reine

Dans le grand labyrinthe, de soleil en soleil,
Volant dans la lumière, comme deux oiseaux ivres
Parmi les dieux nouveaux et les nouveaux amis,
On a mêlé nos vies et réappris à vivre...

Vendredi 10 juillet 2009 à 8:42



<  Clair de nuit  >


Clair de nuit  ( Barbara/C.Lara )  ( 1973 )


Au clair de notre nuit
Des fleurs de lune,
Lunes à la nuit, sont posées
Tes mains, à mon cou nu,
Comme des algues
Brunes, se sont enroulées
Comme des algues
A mon cou nu
Se sont enroulées
Et se balancent
Notre lit est un voilier
Qui se balance, se balance
Sur l'océan de la nuit

Mais le voilier chaviré
Dessous la lune
Lune, dans l'eau, chavirée
Comme deux fleurs de lune
L'une dans l'autre
Dans les algues, enroulées
Comme un torrent
Au fond des mers
Dans l'écume éclatée
Comme on chavire
Et la chambre est un pays
Où l'on vive, l'on chavire

Dans l'océan de la nuit
Au clair de notre nuit
Des fleurs de lune,
Lunes de nuit, sont posées
Au clair de notre nuit
Au clair de nous
Au clair de toi, mon amour
Au tendre de tes yeux
Presque endormis
Au merveilleux de tes bras,
A ton sourire,
A ton silence,
Au calme retrouvé
Ah, on s'endort
Le sommeil est un pays
Où l'on se retrouve encore
Dans l'océan de la nuit

Au clair de notre nuit
Des fleurs de lune,
Lunes à la nuit, sont posées
Tes mains à mon cou nu
Comme des algues brunes,
Se sont enroulées
Dans tes cheveux
A mon cou nu
Tous les deux, accrochés
Ah, recommence
La voile de notre lit
Se balance, se balance
Sur l'océan de la nuit
On voyage
Et l'amour est un pays
Où nos deux corps font naufrage
Dans l'océan de la nuit

Au ciel de notre lit
Des fleurs de lune,
Lunes à la nuit, sont posées...

Lundi 25 mai 2009 à 7:34

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Il faudra des années à Barbara pour accepter de regarder sa voix en face. En 1993, elle parle librement de ce sujet douloureux :  
" Alors, la voix ! Evidemment, elle vieillit, d'ailleurs, c'est vrai que j'ai eu à un moment la voix qui s'est cassée ( En 1984, deux ans avant les représentations de Lily Passion, avec Gérard Depardieu , l'idée lui est même venue de mettre en scène une chanteuse aphone ) et qui, bizarrement, revient maintenant. Bon, alors, il faut aller " avec " il ne faut pas aller " contre " les choses. Quand, par exemple, on entre en scène, on se sent très laid, ça peut arriver, des soirs, bien que la scène rende beau, et bien, il ne faut pas aller " contre " cette laideur, il faut aller " avec " soi, parce que, si on ne s'accepte pas dans cet instant-là, on va pas passer, il faut aller " comme ça " Je dirais même, peut-être, accentuer cette chose, plutôt que d'essayer de la masquer.
Tu peux tout faire sur une scène...
Si tu fais frire des œufs, et que vraiment les gens arrivent à en sentir l'odeur et les manger, c'est bon.
Si tu fais frire des œufs et qu'il n'y a pas d'odeur... ça va pas. "

Cette déclaration illustre parfaitement l'immense intelligence artistique et l'intuition psychologique dont Barbara était dotée. Plus qu'une leçon de théâtre, elle nous donne ici une leçon de vie dont on peut tirer l'enseignement suivant : il nous faut considérer, respecter et dompter ses faiblesses et ses maux, afin de les mettre en scène plutôt que de les subir. Il est certain que Barbara adopta cette conduite, sans doute à la ville, mais surtout sur scène. Ayant parfaitement intégré ses douleurs physiques aussi bien que ses faiblesses vocales, Barbara possédait le grand art de farder ses blessures en y ajoutant plus de rouge-sang. Ainsi, ne sachant plus s'il s'agissait d'une couleur réelle ou d'un maquillage, personne ne pouvait se sentir mal à l'aise à l'audition d'une note approximative ou d'un souffle déchiré. L'intelligente ! Elle savait puiser dans ses défaillances son grand art de la dramaturgie. Tout le talent de Barbara tient à son génie de la théâtralité.

Alain Wodrascka  ( Auteur ) 

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