Samedi 9 juin 2007 à 7:57


Bruxelles


 (
1968 )


J'étais mal dans ma peau. J'en avais assez de Paris. Alors, je suis allée à Bruxelles. J'ai traînaillé encore un peu. Qu'est-ce qu'on peut faire d'autre quand on a vingt ans ? J'ai rencontré des peintres qui vivaient dans une maison étrange. Tout m'arrive toujours, on ne sait pas comment ni pourquoi. J'ai dit aux peintres : " Je veux un piano " Et, le plus drôle, c'est qu'ils m'ont apporté un piano ! Je n'ai jamais su comment, ils étaient complètement fauchés, moi aussi. Comme je continuais à ne douter de rien; j'ai dit aux peintres : " Je veux un cabaret ! " A l'époque, j'étais un peu " Mademoiselle j'ordonne " On a fait le cabaret et j'ai débuté à Bruxelles.


Barbara

Vendredi 8 juin 2007 à 8:22


Dieu


(
1979 )


Oui, je crois en Dieu, bien-sûr que je crois en quelque chose. Mais je ne crois pas qu'il y a un monsieur avec des petites ailes et une grande barbe blanche qui est là-haut, mais quelque chose de mystérieux, et je ne veux pas savoir ce que c'est. Cela dit, quand on voit ce qui se passe, on peut cesser d'y croire, en Dieu.


Barbara

Jeudi 7 juin 2007 à 8:58

 

Carrière


(
1969 )


Je ne regrette pas du tout que les choses se soient passées pour moi comme elles se sont passées. Je suis contente qu'il y ait eu tant d'années écoulées avant que m'arrivent tous ces bonheurs. Et si c'était à refaire, je referais exactement les mêmes choses. Même connaissant ce que je sais aujourd'hui du métier, je referais le même chemin, avec la même joie.


(
1992 )


J'ai attendu dix-sept ans mais, après le premier disque, il s'est passé quelque chose. Il y a eu un cheminement très doux. Quelquefois, c'est vrai que ça me paraissait long, mais je ne me souviens pas d'avoir pensé abandonner. Je ne savais pas ce que voulait dire " vedette ou pas vedette " Je m'en moquais. Je souhaitais chanter. Rien ne m'aurait arrêtée, si ce n'est le succés car il m'a fait peur. Je trouvais ça lourd. C'était un décalage entre mon envie de chanter et mes nouvelles obligations. En 1965, j'ai sorti mon premier album, avec Pierre, Le bois de saint-Amant, Nantes, les premières chansons qui ont vraiment marché. Et, en 1968, j'ai fait un premier Olympia. Et des routes, des routes... Des spectacles partout en France.


1993 )


Il faut tracer son chemin tout seul. Bien sûr, il y a des rencontres qui font souvent avancer les choses. Je crois qu'il faut n'obéir qu'à sa propre loi. Et, si l'on ne sait pas toujours ce que l'on veut, savoir à coup sûr ce que l'on ne veut pas. Finalement, j'ai pu faire ce que je voulais, comme je le voulais, à part très peu de choses. Donc, mes erreurs, je les assume. Et, comme vous le savez, les succés, on les partage... Je crois avoir choisi, consciemment ou non, de m'économiser, de ne pas me répandre à foison. Je me referme sur moi pour mieux me donner.


Barbara

Mardi 5 juin 2007 à 8:17

http://mybabou.cowblog.fr/images/Chatelet87.jpg

 

Théâtre du Châtelet

 


(
1987 )


L'affichage, c'est, jusqu'à preuve du contraire, la meilleure façon de faire du bruit. Moi, je crois que les gens ont besoin de silence... Je crois le silence plus efficace que le tapage. Et puis, ce rendez-vous au Châtelet, c'est un rendez-vous d'amour. On ne fait pas d'affiches pour un rendez-vous d'amour. Si mon amant de mille bras n'est pas là, tant pis. S'il est là, je sais qu'il aura le visage que je souhaite, celui que je connais. Mon amour pour lui est le même depuis toujours. Moi, je change parfois, mon public, non. Il y aura des chansons que je n'ai jamais chantée en scène. Mais quelle importance ? Vieilles ou nouvelles chansons, c'est une question bidon. Il faut bousculer tout ça. La seule chose qui compte, c'est que j'ai envie de chanter mes chansons. Le reste... Ici, j'ai mis trois jours à trouver l'emplacement du piano. J'ai un fichu caractère, je sais, mais mes colères ne sont jamais des caprices.


(
1993 ) 


J'y serai dès le matin et j'attendrai le lever du rideau. Le soir, j'entendrai les spectateurs arriver, comme si ils descendaient des collines. Je capterai leurs discusions, leurs chuchotements, leurs éclats de rire. J'avancerai alors vers la scène avec ma peur. Le théâtre protège de tout. Entre ces murs, on a l'impression d'être à l'abri, d'être dans un monde où ne pénètrent ni la violence ni la guerre.


Barbara

Lundi 4 juin 2007 à 10:21

 

Bonheur


(
1981 )


Tout se paie. Le bonheur se paie. Je ne suis pas du genre qui traverse la vie en faisant " cui, cui, cui " J'aime mieux être seule que seule avec quelqu'un. L'habitude tue.


Barbara

Dimanche 3 juin 2007 à 9:35


Chanson


(
1968 )


René Simon m'a dit un jour : " Tu es une tragédienne, quitte la chanson. " Et bien, non ! Pendant dix-sept ans, j'ai fait les cabarets. J'ai vécu, j'ai aimé, j'ai souffert. Ce que je chante, c'est ce que tout le monde a connu une fois dans sa vie au moins. Je ne crois pas que mes chansons soient tristes. Elles comportent une certaine fatalité, c'est tout.


(
1974 )


La chanson est ma respiration, ma médecine, mon poison, ma religion. C'est l'amour le plus fidèle, le plus fou de ma vie.


(
1981 ) 


Je crois ne pas m'être fourvoyée dans la chanson. Je ne pense pas que j'aurais pu être une grande couturière. La chanson c'est une photo en musique. C'est le véhicule du quotidien. Tout à coup, un air qui vous remémore des odeurs. J'ai l'avantage de pouvoir dire tout haut ce que les gens pensent au fond d'eux-mêmes. Mes chansons ne sont pas des poèmes, juste de petites chansons. Je n'ai pas d'imagination. Je raconte ma vie... Après tout, je n'écris guère, je n'ai pas envie de jeter mes chansons. Je veux qu'elles vivent. Elles en ont le droit.


(
1990 )


Les chansons, ce ne sont que les frôlements de la vie qui affleurent, qui passent en moi, que j'attrape ou que je n'attrape pas. Je n'aime pas enregistrer mes chansons avant de les chanter en scène : le vrai cadeau, pour moi, c'est d'arriver au public avec cette virginité. Je radote. Depuis vingt-cinq ans, je fais la même chanson, lancinante comme une valse à trois temps. Parce qu'on ne fait que ce qu'on sait faire. Il faut radoter longtemps pour installer cette petite musique. Quelquefois, je me dis : " ce n'est pas possible, je vais encore chanter Göttigen ! " Mais si je la rechante, c'est que j'en ai envie. C'est comme un homme, le jour où on n'a plus envie de dormir avec lui, il faut partir ! On ne peux pas tricher avec le désir.


(
1993 )


Il y a des chansons que je n'ai plus envie de chanter. Il y a des chansons que je chante d'une autre façon, parce que le temps les modèle d'une façon différente. Il y a des chansons, Rémusat, par exemple, que certains soir je ne peux pas chanter. Et il y a des chansons que je ne cesserai jamais de chanter, comme Ma plus belle histoire d'amour, écrite pour le public. Je ne retirerai jamais non plus de mes tours de chant Le soleil noir, Le mal de vivre, Pierre, ni L'aigle noir . Si, aujourd'hui, je devais les écrire, je n'y changerais pas même une virgule, non par prétention, mais parce que je suis totalement en accord avec ce qu'elles disent. Beaucoup de gens ont envie d'écrire des chansons. Il y a certainement beaucoup plus d'écrivains qui voudraient écrire des chansons que de chanteurs qui voudraient écrire un livre. C'est étrange, c'est une situation que je ne m'explique pas. Je crois que la vraie démarche, c'est écrire des chansons et les faire bouger dans le temps. Je crois que je pourrais continuer à faire bouger les miennes jusqu'à ma mort, parce que je les entends vivre. Elles avancent avec moi dans le temps.


Barbara

Samedi 2 juin 2007 à 8:54


Cheval blanc


(
1990 )


J'ai ouvert un cabaret, c'était à Bruxelles, dans une friterie qui s'appelait, je n'invente pas, le Cheval blanc. J'y ai rencontré une pianiste classique, une géorgienne, qui jouait la quatrième ballade de chopin. Il y avait aussi un prestidigitateur qui faisait de la manipulation et qui était très séduisant. Si séduisant que je l'ai épousé... Finalement, il est devenu avocat... Je faisait beaucoup de choses, au Cheval blanc. La caisse, la vente des coca... Et je chantais, en m'accompagnant très mal, A l'enseigne de la fille sans coeur, Madame Arthur... Je chantais comme un sabot et je pleurais tout le temps en scène; pour rien; j'étais émue. Les gens venaient, c'est bizarre ! Il a fallu fermer parce que je ne sais pas compter. Nous avions fait des dettes. Je suis alors retournée à Paris et je suis restée six ans à l'Ecluse.


Barbara

Vendredi 1er juin 2007 à 8:49

 


(
1996 )


J'ai maintenant du mal à marcher. A Précy, j'ai dû faire installer une pièce au rez-de-chaussée pour ne pas monter les escaliers, c'est te dire ! Alors je ne vais plus, tous les mercredis et tous les vendredis comme je l'ai fait pendant un an et demi, à l'hôpital Bichat, où j'avais même un petit bureau pour recevoir, pour écouter les malades ( je n'allais dans leur chambre que s'ils le demandaient ) mais je continue à utiliser avec eux, le téléphone. Je vais te dire une chose affreuse : tous mes malades, tous ceux dont je m'occupais, sont morts. Tous. Mais je continue pourtant. Je prends en charge de nouveaux malades et aussi leurs parents. Je continuerai jusqu'à ma mort, jusqu'à rejoindre, à mon tour, les morts que j'ai accompagnés.


Je savais que c'était ma dernière tournée. Longtemps, j'ai chanté entre mes crises d'asthme. Là, je savais que j'allais devoir chanter avec. Est-ce que tu imagines qu'on a même refusé de m'assurer ? C'était donc un risque sur ma propre vie. Et pourtant, je suis partie sur les routes sans tristesse. Quand ce fut terminé, à Tours, j'étais vraiment au bout de moi, j'avais des spasmes, mon oeil droit foutait le camp, je titubais sur scène, je perdais la mémoire, je ne commandais plus mon corps, j'en passe et de pires. J'ai alors pris la décision d'arrêter. Il y avait deux solutions ensuite : avancer en faisant autre chose ( on m'a proposé de jouer, dans une pièce de théâtre d'un auteur américain, le rôle de la Callas, j'avoue avoir hésité un instant ) ou bien reculer. Les gens auraient peut-être aimé que je recule, moi, je ne l'aurais pas supporté.


Barbara

Lundi 28 mai 2007 à 9:04

 
Le dernier album


(
1996 )


C'est le dernier, c'est formidable. Soixante-six ans, c'est rien, on s'en fou, mais j'ai fini ça. C'est le dernier cri. Le dernier silence... Le dernier trait d'union. Je sais le dérisoire de ce disque face au quotidien. Il n'y a aucun cynisme à garder une distance et un humour face aux choses qui viennent de vous. D'ailleurs, je déteste le glacé du mot " cynisme "


C'est bouleversant. Après douze ans de silence entre nous, Eddy louiss est arrivé de Poitier dans une camionnette. Il a posé ses doigts sur l'orgue et c'était mille soleils qui sortaient ! J'ai vu débarquer, avec son accordéon, Richard Galliano qui était pourtant en tournée ! Et Jean-Jacques Milteau qui m'a demandé, l'harmonica à la main : " Est-ce que je vais savoir ? " Alors, que c'est moi qui avait le trac ! Et le merveilleux Didier Lockwood, et Loïc Pontieux, le premier batteur qui m'ait demandé à lire les textes de mes chansons... Et tous les autres !... Si le disque est raté, j'en suis responsable. Si il est réussi, ils en sont responsables.


Ce disque-là je voudrais qu'il me ressemble, avec seulement le temps qui a avancé sans me changer. Quand je l'écoute, je pense que je suis OK avec cette femme-là, que je n'ai pas honte ... Je n'ai honte que de la misère, du malheur, de la souffrance et de l'exclusion. Je sais bien que je suis au bout de ma route, mais ça n'est pas triste. C'est même plutôt joli, car plus le temps passe, plus je me sens libre.


Mon dernier album remonte à seize ans, c'est vrai, mais depuis, j'en ai fait des chansons ! Regarde, Pantin, Raison d'état, Sid'amour à mort, Gauguin, Rêveuses de parloir, Vole de nuit, et bien d'autres encore ! Cela dit, en seize ans, je n'ai pas vu ma vie passer. J'ai chanté. Il me fallait prendre un temps plus long pour entrer en studio. Les théâtres sont des navires de pleine mer. Le studio est un sous-marin. C'est un autre voyage.


Si j'en avais le pouvoir, ce disque serait pour épargner l'hiver à ceux qui vont le traverser rudement. Mais le monde a besoin d'autre chose que de chansons. D'une autre chaleur, moins éphémère. En tout cas, pour moi, c'est un bonheur de l'avoir fait avec des gens que j'aime. Je l'ai mené jusqu'à la gravure. Aujourd'hui, j'ai un peu peur. Mais j'en suis très heureuse. Je peux tout donner, on peut tout me prendre, mais qu'on ne touche pas à un mot, à une note. Ca me met dans des colères de tigre. Quand ce disque aura pris son envol, je vais me reposer, regarder la douceur de l'automne. Et rester à l'écoute. En retrait, mais attentive. Cet album, c'est un moment magique : une liberté totale de choix et de rencontre. Comme toute ma vie.


Barbara

Lundi 21 mai 2007 à 10:15


Séduction


(
1996 )


Nous avons tous envie de charmer pour séduire l'autre et souvent pour convaincre les autres. La séduction, quel joli mot, déjà comme une danse ! En amour, il ne faut pas s'habituer, il faut conquérir, reconquérir, donc séduire. La séduction est fascinante mais elle peut aussi devenir une arme dangereuse.


Barbara

<< Page précédente | 9 | 10 | 11 | 12 | 13 | 14 | 15 | 16 | 17 | 18 | Page suivante >>

Créer un podcast