Samedi 13 octobre 2007 à 9:17

 


Tricot


(
 1992 )


Je suis incollable sur les laines ! Ça détend. Surtout au cours des périodes qui précèdent le travail. Ça peut être une longue nuit blanche où je rumine en tricotant... Pendant ces périodes, je suis frénétique de laines, d'aiguilles circulaires. Je suis concentrée sur les dessins, la matière. On ne peut plus me parler ! A un moment donné, je faisais des tournées en fonction des maisons qui vendaient de la laine ! C'était fou !


Barbara

Jeudi 11 octobre 2007 à 9:11

http://mybabou.cowblog.fr/images/fgghy.jpg


Denise Glaser


(
1981 )


Une femme a fait beaucoup pour moi à la télévision, il y a bien longtemps, c'est Denise Glaser. Elle a eu un courage fou ! Au début des années soixante, pour passer dans son émission Discorama, comme son nom l'indique, il fallait avoir fait un disque. C'était à l'époque de Nantes et je n'avais encore rien enregistré. Alors, elle a fait fabriquer une fausse pochette. Et je suis passée à Discorama.


(
1997 )


Denise Glaser ! Ah, Denise Glaser. Le corps de Betty Boop avec un décolleté vertigineux, une robe de crêpe blanc très moulante à très gros ramages, un visage de presque madone et une voix grave, presque privée d'intonations, languide, comme une seule et même note tirée par l'archet à la contrebasse. Toute pareille à son image sur le petit écran, la Glaser !


Barbara

Mardi 2 octobre 2007 à 8:47


J'ai reçu tellement d'amour, tellement ! Et toute cette énergie qui m'a fait avancer, chanter, qui m'a permis de faire ce métier comme j'entendais le faire : en désobéissant, en refusant tous les archétypes, en ayant un instinct de préservation qui m'a toujours empêchée de me perdre dans le compromis, la confusion. Je ne détiens aucun secret, aucune formule magique. Il faut prendre le voile, préserver son désir, ne jamais s'en départir, rester bien à l'intérieur de soi. Exiger autant de soi que des autres. " Vigiler " pour les autres autant que pour soi. Vouloir avec une inentamable opiniâtreté. Être sa vérité. Ne jamais perdre espoir. Vouloir recommencer. Avoir peur mais avancer toujours... "


Barbara

Vendredi 14 septembre 2007 à 8:47


Nous avons tous tendance à croire et à prier quand ça va mal. Moi, je crois en tous temps ! Même si les explications ne me conviennent pas toujours. Je crois en l'homme, qui est, je le sais, à la fois l'horreur et la beauté... Mais je ne sais pas ce qui m'a donné cette force de vie, cet instinct de préservation. La guerre, la route ? Ou quoi ? Ou qui ? Qu'est-ce qui m'a permis de faire ce que je voulais, au plus près de ce que je voulais; d'être entourée de tant de gens qui m'ont aimée et que j'ai aimée, jusqu'à épuisement ? Je n'ai rien guéri, je n'ai rien sauvé, j'ai seulement traversé des instants, aussi précieux, certains instants, qu'une feuille à un arbre.


Barbara 
  ( Télérama, novembre 1996 )

Lundi 3 septembre 2007 à 9:12


Télévision


(
1979 )


La télé, ça n'est pas ma conception du spectacle. Ma conception du spectacle, c'est la paillette. Il y a, à la télévision, une gravité qui m'ennuie.


(
1981 )


Il faut être télégénique, premier problème. Or, si moi je fais une télé ratée, ça va faire peur aux enfants.


(
1993 )


Les images qui me parlent des autres me fascinent très souvent ( je suis une grande zappeuse ! ) mais renvoyer mon image par le biais de la télévision me fait très peur. La scène, c'est différent, c'est mon bateau. J'aime l'image des autres et j'aime le noir et blanc. Je n'aime pas mon image et je ne peux pas laisser ma vie se réduire à trois minutes. Il faudrait que j'accepte de m'abandonner. Et puis, j'ai déjà un profil dur. Imaginez-le en couleur ! Imaginez-moi invitée au journal de 20 heures, ce western de la mort, et annoncer après la Bosnie : " Eh bien, à partir du six novembre, je serai au châtelet " ... Aujourd'hui, tout semble dérisoire, indécent, y compris chanter. Il y a comme un sanglot qui ne passe pas. Faire des télés, ce n'était pas mon truc. Ce n'était pas mon chemin. Je vais même plus loin : si j'avais cédé à toutes les demandes d'émission, sans doute aurai-je perdu quelque chose, car les gens ne comprendraient pas. Ce serait comme une trahison. Il est prouvé qu'on peut faire son chemin à côté de tout ça en étant quand même dans le métier. Je ne le renie pas. Une absence est tout de même une chose plus forte qu'une présence constante. Il y a des gens que j'adore, mais si je les vois tout le temps, je n'ai plus envie de les voir !


Barbara

Samedi 1er septembre 2007 à 10:00


Elsa Triolet, Aragon et Françoise Sagan venus la féliciter, lors de sa première officielle à l'Olympia le 4 février 1969.


Succès


(
1965 )


Une vedette, moi ? Oui, depuis un an ça marche très bien pour mes chansons. Je ne regarde plus après un ticket de métro. Mais, mise à part la suppression des ennuis matériels, le succès m'a apporté un bien plus précieux : la possibilité de chanter tout le temps... Gala, tournée... Je n'arrête pas. A peine puis-je voir mes amis de temps en temps. C'est le plus ennuyeux !


(
1969 )


Dans l'instant, il procure une espèce d'assurance qui fait qu'on marche mieux dans sa peau. Ce qu'il m'a apporté ? La joie très grande de pouvoir chanter, d'être une femme qui chante constamment, ce que je voulais. Et puis une espèce de confort matériel qui me permet d'assumer des gens, ce qui pour moi est très, très important. Ce qu'il m'a enlevé ? Il m'a poussé vers un désert, parce que je crois que le succès isole. Cela dit, il faut le conquérir tous les jours. Il peut vous être acquis un soir, mais si le lendemain on rate une chose, tout est effacé. C'est donc un pouvoir, sans doute, mais un faux pouvoir.


(
1987 )


Chaque jour je recommence. Le succès n'existe pas ! Il y a des gens qui ne m'ont jamais vue sur scène. Maintenant, j'ai les enfants des autres, qui ne me connaissent pas. Ce sont des débuts à chaque fois. Alors, aujourd'hui, je débute... A 57 ans, c'est toute la différence !


Barbara

Mercredi 29 août 2007 à 8:39


Style


(
1968 )


Je n'ai pas essayé d'avoir du style. Je me suis mise en noir parce que j'aime le noir. J'ai pris une robe longue parce que je n'aime pas montrer mes jambes en scène.


(
1996 )


Je n'ai jamais pensé que j'apportais une marque ou un style. Depuis le début, contrairement à ce qui a souvent été dit, j'ai toujours suivi mon instinct, ma réalité. J'étais la première étonnée que des gens s'étonnent de me voir habillée en noir pour chanter, alors que le noir, chez les autres chanteuses, leur paraissait une normalité. J'ai découvert mon " étrangeté " et mon " style " à travers les écrits et le regard des autres. Chacun de nous promène un univers, une différence, c'est ça, le style ?


Barbara

Mercredi 22 août 2007 à 17:44


 Seule


(
1981 )

Elle est pas mal la pochette... Et pourtant je ne voulais pas de photo... Il y a un moment, en effet, où c'est mal élevé de se montrer en photo,. Je ne vais pas le faire jusqu'à 70 ans. Faut arrêter, un jour, par décence. Je savais que les gens attendaient ce disque avec ces chansons-là, sans rien trahir. Ce disque a été conçu avec la même équipe du début : Michel Colombier, Roland Romanelli, Eddy Loiss. Nous l'avons couvé. Je l'ai accompagné jusqu'à la pochette, sans le quitter d'un oeil. On y retrouve six chansons qui figuraient sur le microsillon du dernier Olympia, c'était il y a trois ans. Je voulais les enregistrer en studio. Il y a donc six ans que je n'avais pas gravé de disque en studio.


Barbara

Mardi 7 août 2007 à 9:44


Public


(
1968 )


Je n'ai pas été faite par la presse. C'est le public qui m'a révélée à moi-même, lorsqu'un soir, il y a deux ans, à Bobino, tout a commencé et que je me suis trouvé bien dans ma peau. Ce qui fait le miracle, c'est le public. Si pendant une heure je fais oublier leurs déclarations d'impôts à dix, cent ou mille personnes, si je les fais rêver, si je leur chante une histoire d'amour qu'ils ont tous vécus, je suis heureuse avec moi-même. Il y a des moments, en scène, ne serait-ce que cinq minutes, où l'on sent la communion. Je suis toujours émerveillée qu'il y ait du monde pour m'écouter.


(
1974 )


Je lui doit tout, je lui donne tout, je lui donnerai jusqu'à la dernière goutte de mon sang. Ils savent ça. C'est pour ça qu'ils m'aiment. J'ai attendu cinq ans pour obtenir d'un théâtre qu'on vende les places à un prix raisonnable : à quelqu'un qui vous aime et vient vous voir, on peut demander un effort, pas un sacrifice. Je passe des bras de Saint-Etienne à ceux de Bordeaux... Et je vois aussi les mêmes visages. C'est extraordinaire, ça ! Et je les reconnais toujours, même sur de très longues années, puis je les connais bien, je connais leurs visages... Ils sont d'ailleurs très étonnés parce que je leur dis : " A telle date je vous ai vu et vous vous appelez comme ça " J'ai une grande mémoire de leurs visages.


(
1981 )


L'essentiel, c'est de ne pas trahir ma vérité, c'est-à-dire le public. J'ai des relations passionnelles avec lui parce que c'est lui qui m'a faite. Excusez-moi de vous dire ça, mais ce n'est pas la presse, malgré des articles superbes. ce sont les soixante spectateurs de l'Écluse. Je me dis qu'on va leur faire la fête pendant deux heures et que, puisqu'on n'est pas venu uniquement par générosité, on va se faire plaisir aussi. Donc, il ne faut pas rater ça. Alors je m'épargne. Je fais fermer les coulisses. je suis comme un loup. je n'ai jamais vu ma mère avant un spectacle. Il faut avoir la politesse de se présenter quand on se sent bien, quand on peut transmettre la chaleur. Si on ne peut pas donner, il vaut mieux se cacher.


(
1990 )


Ce public jeune, il choisit ce qu'il vient entendre. Moi, en plus des gens qui me suivent depuis le début, j'ai toujours eu un public jeune. Mais je pense que les chanteurs auteurs touchent fatalement, un jour, trois générations. Je suis davantage étonnée de voir des gens de mon âge dans la salle que des jeunes. Parce que les gens de mon âge, je me dis qu'ils doivent être las de m'entendre ! Le public comprend. Il sait que je ne suis pas étrange. Il n'est heureusement pas tombé dans le piège du " Vous êtes étrange, mystérieuse " On peut être différent sans pour autant être bizarre. Je connais bien mes fragiles. Il y en a que j'ai connus cassés, et c'est un bonheur de les voir maintenant " J'ai un enfant, je vais bien " Je vois une femme qui a ôté son alliance et qui, sans un mot, me l'a tendu. J'ai couru derrière elle, et elle n'a pas pu parler.


(
1993 )


J'ai toujours peur de n'être pas à la hauteur de cet amour-là, de ce désir-là. C'est classique : plus on est attendu, plus on est angoissé et fragile. Quand le rendez-vous d'amour est proche, on a peur. Cette peur, je l'ai toujours, à soixante-trois ans... C'est une vieille compagne ! Le jour où je ne l'aurai plus, j'arrêterai de chanter. Nous n'en sommes pas là ! Ce qui compte, pour préserver cet amour-là, c'est d'être rare, de reprendre un souffle. je crois que, si j'étais plus présente, je risquerais de le perdre encore plus vite. C'est normal qu'on ai peur de perdre un amour. Mais c'est normal aussi qu'on s'absente pour ne pas l'étouffer.


(
1996 )


Il est tout pour moi. Nous faisions route ensemble, il y a encore très peu de temps. Je ne ressens ni manque, ni chagrin. C'est comme ces belles grandes fatigues après l'amour. Comme une grande liberté d'avoir choisi de m'absenter de la scène.


Barbara

Dimanche 5 août 2007 à 8:16


Göttingen


(
1987 )


Quand j'étais à Écluse, un jeune Allemand, très beau, m'avait proposé de venir chanter dans son pays, à Göttingen. Je dis oui. Quand j'arrive, horreur, j'aperçois un piano droit. Mon ami s'excuse, gêné, invoque une grève des transports. Je lui réponds que je ne peux pas chanter avec un piano droit. C'est alors que douze sublimes étudiants m'on apporté à bout de bras un superbe piano à queue. J'ai chanté. Je suis restée huit jours et j'ai écrit pour eux cette chanson, dans un jardin de curé.


Barbara

<< Page précédente | 7 | 8 | 9 | 10 | 11 | 12 | 13 | 14 | 15 | 16 | Page suivante >>

Créer un podcast