Vendredi 7 août 2009 à 9:01

 
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Croquis de Luc Simon

Barbara a habité un an et demi chez moi, me confiera France Olivia, la pianiste de L'Ecluse. Avec mon époux, Olivier Grégoire, nous étions jeunes mariés et habitions dans l'île Saint-Louis, sur les quais de Béthume. Une vie merveilleuse. Olivier, cinéaste et peintre de grand talent, hébergeait notre ami intime Paul Braffort. C'était une maison de bohème et d'accueil, Dadzu ( le dessinateur humoriste ) y séjournait avec nous, François Billetdoux, notre ami d'enfance, nous y retrouvait. Mon métier de pianiste me permettait de rencontrer toute la rive gauche. Je connaissais bien Boris Vian. Je ne peux pas dire que j'ai aidé Barbara, ce serait orgueilleux de ma part  :  je suis une femme de l'ombre et de l'amour. En 1951, tout en faisant parallélement des tournées avec des artistes, je commence à jouer à L'Ecluse, un étroit bistrot en longueur, avec tout au bout, une scène minuscule et un piano situé à gauche de telle façon qu'on l'aperçoit depuis la porte d'entrée. Chaque soir, de mon poste, j'entrevois une grande fille avec une crinière fabuleuse. Une Juive de l'Antiquité, superbe, généreuse et terrifiante à la fois..., une Walkyrie ! Elle me regarde fixement et je me dis mais enfin, qu'est-ce qu'elle me veut ? Ce manège dure plus d'un mois et demi. C'est impressionnant. Un soir, elle vient jusqu'au piano et me murmure  :  Je veux vous parler... Nous allons prendre un verre. Là, elle me confie  :  Je n'ai aucun domicile à Paris. J'apprendrai par la suite qu'elle habite dans un appartement, rue Vitruve, avec sa mère et son frère. Comment ne pas être attendrie par son triste sort ? Mon mari a un atelier au-dessus de chez nous. Elle s'y installe pendant un an et demi. J'ai un point de repère assez particulier..., je me souviens de ma fille qui, à trois ans, lui répète inlassablement  :  Barbara, tu chantes faux ! Non seulement, poursuit France, Barbara a le goût du piano, mais, en plus, elle est fort douée ( on a envie de la pousser au maximum ) Très intuitive, avec un sens de la répartie décapant  :  un aigle. Bien plus tard, lorsqu'elle écrira L'Aigle noir, je la reconnaîtrai. Dès le début, elle se montre surdouée dans tous les domaines, une véritable extrémiste. Son humour est unique, et son mystère, fou. Elle a un sens exacerbé de sa valeur. Nous avons des fous rires inimaginables. Un soir je rentre de L'Ecluse plus tôt que prévu... Ce soir-là, nous parlons beaucoup, je lui demande  :  Qu'est-ce que tu veux faire plus tard de toi ? Elle me dit  :  Je veux être chanteuse, c'est sûr, je veux être chanteuse, je veux faire carrière... Olivier s'en mêle  :  Ecoute, je t'en supplie, il faut l'aider, fais-le pour moi... Emmène-la dans les cabarets où tu travailles, il faut qu'elle y arrive ! Je la présente à L'Ecluse, mais après sa première audition  "  malheureuse  "  rien à faire... ( elle est beaucoup trop grande, trop  "  énorme  "  pour notre cabaret, elle  "  occupe  " trop la scène ! ) J'insiste auprès de mes copains,  "  les patrons  " ( Léo Noël, Brigitte Saboureau, André Schlesser et Marc Chevalier )  :  Prenez-la en audition, au moins une semaine... C'est ainsi que Monique, flanquée du prénom de sa grand-mère russe, chante en première partie du spectacle toute une semaine sur le fameux piano droit que je connais bien, face au mur décoré par une bouée. Chaque soir, soixante-dix personnes ( la capacité maximale de L'Ecluse ) découvrent Barbara. Par la suite, France Olivia la présente à La Rose Rouge, rue de Rennes, un établissement plus important, plus vaste ( un petit théâtre ) Ensemnle, elles voient aussi La Fontaine des Quatre-Saisons, un cabaret dirigé par Pierre Prévert ( le frère de Jacques... ) Barbara rêve toujours de l'Opéra-comique ! Une anecdote piquante dont se souvient France, elle est engagée à La Fontaine... en tant que  "  plongeuse  "  situation saugrenue mais qui lui permet de côtoyer  "  par la petite porte  "  les grands de ce monde ! Quand Barbara se déchaîne, elle est passionnée... Un moment elle s'éprend de Dadzu, un petit bonhomme, charmant, plein d'humour. Folle amoureuse, elle tombe sur lui comme un oiseau de proie. Il habite vers la rue de Seine, un studio au septième étage..., le septième ciel ! Lorsqu'elle découvre l'étroite pièce sous les toits, elle décide de vivre avec l'humoriste. Dadzu, tout surpris...  : 
- mais c'est tout petit chez moi...
- ça ne fait rien,
répond Barbara, on s'aime ...!
Après deux jours et deux nuits...
- je suis bien, mais mon piano me manque.
ton piano
, s'étonne Dadzu, tu veux dire  "  un petit piano  " ?
Le lendemain, marche par marche dans un escalier infernal en colimaçon, un piano à queue est hissé par huit spécialistes jusqu'au septième étage ! Une aberration ! L'instrument installé, pas question d'accéder au coin cuisine. On n'entre plus dans le studio, on tombe sur le piano ! Qu'importe, les deux tourtereaux se faufilent. Au bout de huit jours, Barbara ne tient plus  :
- Dadzu, ce n'est pas possible de vivre comme ça, vraiment, ce n'est pas possible... je m'en vais !
- tu t'en vas..., mais ton piano ?
- je te le laisse en souvenir !
L'humoriste confiera  l'anecdote à ses amis, notamment à André Gaillard et Roger Pierre, compagnons de cabaret. Roger, malicieux, dévoilera l'histoire de  "  l'encombrant cadeau  "
Barbara ne pouvait pas vivre sans Dadzu, après elle ne pouvait pas vivre sans piano. Finalement, elle ne pouvait pas vivre du tout !


Extrait du livre

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Par jazz le Vendredi 7 août 2009 à 11:13
coucou Babou

ah tien ce livre me dis quelques chose , j'ai du le feuilleté un jour en librairie .

je viens de glisser un nouvel article sur jazz , sur Nguyen Le , un guitariste

bonne journée et bon w end à venir
bises et A+ de Emmanuel
Par Paskale le Vendredi 7 août 2009 à 11:13
Barbara... Le raz~ de~ marée ^.^

J'aime bien ce genre de lecture qui montre derrière le miroir. Une femme explosive et aimante au possible!

BISOUS!
Par repermusiques le Vendredi 7 août 2009 à 16:08
C'est bien vrai qu'on ne peut pas vivre sans piano :) Et je rajouterais aussi volontiers qu'on ne peut pas vivre sans tourne-disque ! Les deux restent indispensables, avec bien naturellement, un poste radio :)

Bises
Par lagrandemymy le Samedi 8 août 2009 à 21:08
J'ai eu une énorme pensée pour toi hier, et un très beau moment que j'aurais aimé partager : je vais habiter, très bientôt, à quelques mètres de la maison où est née notre chère Barbara.

J'espère que tu vas bien.

<3
Par poupoune le Dimanche 9 août 2009 à 13:27
le croquis et magnifique !!! j'espère que ma ptite babou se porte bien !! gros bisous et bon dimanche !!
Par http://www.lebeaussetautrement.fr le Mercredi 19 août 2015 à 5:18
Dans la grande maison d'Eglantine
Les volets se sont fermés
Dans le matin léger, Eglantine
Pour toujours, s'en est allée,
Par Code Promo Uber le Samedi 5 septembre 2015 à 17:29
Avez vous un lien pour que je puisse télécharger l'article en PDF ?
Par serrurerie paris 15 le Lundi 7 septembre 2015 à 10:24
Excellent article je vous soutient .
Par http://www.antiquites-carrau.fr le Lundi 25 janvier 2016 à 4:02
Dans la grande maison d'Eglantine
Les volets se sont fermés
Dans le matin léger, Eglantine
Pour toujours, s'en est allée,
Pour toujours, s'en est allée
Par http://www.zoe-photo.fr le Mardi 15 mars 2016 à 4:06
Exaltée et volage, amante passionnée et victime consentante.
Par http://www.nicoledubois-terraangelica.fr le Samedi 28 mai 2016 à 8:46
Barbara était une artiste exceptionnelle et en même temps quelqu'un de très fragile et de douloureux.
 

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