Un amant de mille bras
Au fil d'un parcours de plus de trente ans, la chanteuse a fait de son public sa " plus belle histoire d'amour. "
Regard sur une relation passionnelle.
Bien des journalistes y ont cassé leur plume. Les relations qu'entretient Barbara avec la scène et son public sortent de l'ordinaire. Toute sa vie semble consacrée au spectacle. Comme si la chose lui était nécessaire, vitale, indispensable. " Pour moi, chanter c'est respirer. Je ne pourrais pas ne pas chanter. C'est mon souffle " Barbara parle du public, comme on parle d'un amant. Plus encore, elle a fait de cette chanson, Ma plus belle histoire d'amour. Un texte manifeste, qui dit les espoirs, les attentes et les soirs de découragement, jusqu'au bonheur de récital de Bobino, le point de départ de son succès. " J'avais fini mon voyage / Et j'ai posé mes bagages / Vous étiez venus au rendez-vous / Du plus loin qu'il m'en souvienne / Si depuis j'ai dit " Je t'aime " Ma plus belle histoire d'amour c'est vous. " Tout est là. Dans le texte, et la façon de le chanter. Depuis 66; jamais la chanson n'a quitté les spectacles de Barbara. Et ce n'est pas un hasard. Ma plus belle histoire d'amour marque toujours le point d'orgue d'un récital. Comme si, au fond, Barbara n'était venue que pour ce titre-là. Sue scène, la chanson commence doucement, on dirait une confidence. Puis elle entame un lent crescendo. Barbara le finit yeux fermés, paumes ouvertes, bras tendus vers son public. Avant de serrer de nouveau les bras en signe d'étreinte. Symbole, symbole... " Dans ma vie de recluse / Je me revois parfois / sur la scène de l'Ecluse / Faisant mes premiers pas. " Barbara n'est pas omniprésente dans les programmation des théâtres, loin s'en faut. Entre les variétés et l'Olympia ? 4 ans. Entre Pantin et Lily Passion ? 5 ans... sans un disque, sans une apparition télé. Des retraites loin des planches, qui permettent de ne pas galvauder le spectacle. De " garder intact son désir de chanter " Et de ce désir-là, on ne fait pas n'importe quoi. Dés ses débuts à l'Ecluse, Barbara arrive à 21 heures pour ne chanter qu'à minuit et demi. Plus tard, à Bobino, l'Olympia ou en tournée, elle arrive toujours très tôt le matin, fait le tour de la salle, essaie les sièges, parcourt les couloirs. Dès que c'est possible, elle délaisse sa maison de Précy pour dormir sur place. A Pantin, une roulotte lei sert de loge. Un besoin d'habiter les lieux, mais aussi de se rassurer " Plus on avance, plus on a d'inquiétude (... ) Le jour où l'on n'a plus n'a plus peur, il est temps de s'arrêter " Chaque fois c'est le repli sur soi. Chacun de ses gestes est fait pour s'isoler de reste du monde, pour lui façonner la concentration la plus solide possible. Avant un récital, il lui arrive de asseoir des heures dans le rocking chair, les yeux fermés, sans dire un mot. Avant Lily Passion, elle recommence mille fois les gestes du spectacle, en silence, indifférente aux techniciens qui s'affairent tout autour. Rien à voir avec les habituelles séances de " balance " Chez Barbara, un spectacle se prépare dans une quasi-religiosité. Toujours a mi-chemin entre l'exigence et le superstition. Entre le professionnalisme et la déraison. A contrario, le récital, c'est LE moment d'abandon. Celui qui mène à une espèce d'état second. Celui où la chanteuse met sa vie en jeu. Et ils ne sont pas rares, les soirs où Barbara aborde la scène avec une grande fatigue et, qu'au contact du public; l'énergie revienne comme par enchantement. " Et dans l'océan des salles obscures / Leurs mains sont comme des fleurs d'écume / Qui s'ouvrent, se referment / Me caressent / Et me bercent / Et m'emportent " Le public ? Il suit la chanteuse dans sa démesure, pris par tant de passion et la conviction qu'il est bel et bien la plus belle histoire d'amour de Barbara. Et quand on se retrouve dans la magie du théâtre, même les plus réticents ont du mal à résister ! Pour Barbara, le public peut avoir des réactions inhabituelles, qui dépassent le cadre symbolique s'il en est, une femme s'approche de la chanteuse après le spectacle, lui donne son alliance et s'éclipse très vite. Au point où Barbara a bien conscience de laisser parfois derrière elle " De grandes détresses " Il est peut-être temps de casser le mythe de la chanteuse " Qui se donne au public " Généreuse, Barbara l'est. Sans l'ombre d'un doute. Mais en face d'elle, elle trouve un public prêt à donner beaucoup. Un public qui attend et n'hésite pas à revenir la voir quatre, cinq, six fois ( ou beaucoup plus ! " Cela fait bientôt quarante ans que les premiers fidèles se pressaient à l'Ecluse pour l'écouter. Aujourd'hui, la ferveur reste la même. Barbara et son public, c'est l'une des relations les plus passionnelles de l'histoire de la chanson. Une relation à double sens. " Chanter, c'est un engagement d'amour ( ... ) Un échange. Parce que sans eux ( le public ) je n'existe pas."
Valerie Lehoux ( Journaliste )
Merci pour ta carte <3