Jeudi 17 mai 2007 à 9:13


"  Rester en colère... " Disait-elle


Dans le silence de Précy, Barbara guettait le monde. Loin des médias, elle se battait contre ses souffrances. La misère, la solitude, l'incompréhention, et bien sûr le sida. Elle s'engageait pour une cause : La vie. Elle avait inventé un mot. Un verbe. Pour dire toute l'attention portée au monde. " Vigilons ! " répétait-elle sans cesse. Il faut vigiler et agir. " Rester en colère, sinon on est foutu. " Savoir s'indigner; ne jamais se résigner, ni accepter les blessures du monde comme une fatalité. Barbara se sera battue, tout au long de sa vie, avec ses mots d'amour et ses gestes empreints de discrétion. Au soir de sa mort, on ne s'y est pas trompé. La presse a salué l'artiste et la militante des causes justes. Celle qui avait tant donné, par exemple, pour la lutte contre le sida... Cette peste de l'amour qui l'avait bouleversée. Etonnante comme toujours, elle avait crée son " Sid'amour à mort " dans un châtelet complet et l'avait jeté, tel une gifle, à son public médusé. C'était en 87 " Elle m'avait contactée quelques temps auparavant --rappelle Line Renaud-- pour me dire qu'elle voulait, elle aussi, mener ce combat
" A l'époque, ils n'étaient pas si nombreux à oser parler du sida avec tant de douceur et de rage à la fois. Elle aurait pu se contenter de chanter, Barbara. Faire son métier d'artiste, dénoncer ce qui la révoltait, distiller ses doses d'amour. Mais c'était mal la connaître. " Je n'ai jamais pensé que la chanson allait changer le monde. Pour ça, il faut descendre dans la rue. " Alors elle a voulu bouger. Quitter le rouge des théâtres pour le blanc des hôpitaux, aller frapper aux portes, visiter les malades " Je demande toujours la permission avant d'entrer... " Elle avait même fait installer une ligne de téléphone entre l'hôpital et sa maison de Précy. Ce qu'elle leur disait ? Ce qu'ils lui disaient ? Motus. Et puis il y avait ce public, son public, qu'elle voulait protéger. En 90, à Mogador puis en tournée dans toute la France, elle fait distribuer des préservatifs à la fin des concerts. Les petits paniers en osier sont là, il n'y a qu'à se servir. Et tout le monde se sert. Quelques minutes plus tôt, sur scène, elle avait prévenu : " Il n'y a pas trente-six solutions contre le sida... Alors, mettez-les moi, ces préservatifs... Ou abstenez-vous, si vous préférez... Mais bon... " Le message était délivré avec tant de tendresse et d'humour que personne n'y résistait. Barbara ne s'est jamais renfermée dans sa bulle à contempler ses états d'âmes. Elle était tout ouverte sur le monde, sur ceux surtout qui n'y trouvent plus leur place. Les malades bien sûr, mais aussi les enfants délaissés ( elle participe à des collectes pour les orphelins ) ou les femmes emprisonnées qui l'avaient si profondément touchée. pour elles, elle avait écrit ses " Rêveuses de parloir " Surtout, elle était allée chanter dans les prisons. A mille lieux du mythe de la femme intouchable dont on l'a si souvent parée. A Fresnes, il y a toujours ce piano noir, cadeau de Barbara... Et puis dans ces temps de misère rampante, elle avait voulu réchauffer les oubliés de la prospérité. Les femmes du tiers-monde, d'abord, en participant à un disque collectif, en 1993 ( la chanson de la vie ) Les sans abris, ensuite, en essayant de réveiller la solidarité. Un soir d'automne 1993, sur la scène du châtelet, elle demande : " Faites-moi plaisir. Lorsque vous rentrerez chez vous, ouvrez votre armoire, prenez un vieux pull et donnez-le au SDF de votre quartier... " Un an plus tôt, déjà, elle avait lancé le même appel dans les médias. Car Barbara, femme engagée dans la vie de sa cité, n'avait guère un tempérament partisan. Il y a bien eu cette chanson " Regarde " ( que les médias ont rebaptisée " l'homme à la rose " ), écrite au soir du 10 mai 1981. Mais elle fut plus dictée par l'explosion d'une joie populaire que par des considèrations purement électorales. " On pourrait encore y croire ! / Avant qu'il ne soit trop tard. " Et si la dame avait ses idées, si elle a signé quelques pétitions, si elle n'a jamais caché sa sympathie pour François Mitterrand ( qui, d'ailleurs, la lui rendait bien ) au point d'avoir chanté dans deux de ses meetings, elle ne brandissait pas d'étendard. Ou alors un seul : celui de l'amour. C'est cet étendard-là qui flotte toujours au sommet de son île. Ses " Soleil noir " et " Perlimpinpin " -- Titres de colère et de combat -- sont ses cris de révolte, spontanés et déchirants " J'ai souvent honte de ce monde ", confessait Barbara. Alors elle chantait. Elle se disait " impudique et impuissante ", mais parvenait à adoucir les bleus du corps et de l'âme. Comme avec " Göttingen " , par exemple, son premier grand texte d'engagement. Titre écrit pour une ville allemande, ses roses et ses enfants blonds, vingt années seulement après la fin d'une guerre qui avait vu sa famille fuir et se disloquer. Titre lourd de sens, de passé meurtri et de promesses d'avenir. Mais là encore pas de politique, rien que de la tendresse. " Je ne fais pas de chanson engagée, je ne fais que des chansons d'amour. " Göttingen " est une chanson d'amour. "


Valèrie Lehoux
  ( Journaliste )

Par pilgrim.II le Jeudi 17 mai 2007 à 16:33
Colère et intolérance sont mes ennemis...
Mais si parfois il faut "gueuler" et bien ... gueulons , mais pour une noble cause !

Je t'embrasse ma puce ;)
 

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