Mes hommes ( Barbara/Barbara ) ( 1968 )
Ils marchent le regard fier,
Mes hommes
Moi devant et eux derrière,
Mes hommes
Et si j'allonge le pas,
Ils me suivent pas à pas
Je leur échappe pas
Mes hommes, mes hommes
Où que je sois, ils sont là,
Mes hommes
Je n'ai qu'à tendre les bras
En somme,
Je les regarde venir,
Fière de leur appartenir,
C'est beau de les voir sourire,
Mes hommes
Moi qui suis fille des brumes
En somme
De la nuit et de la lune,
Tout comme
Quand j'arrive, le teint clair,
Moi devant et eux derrière,
Je comprends bien que les gens
S'étonnent, s'étonnent
Car ils viennent de Tunisie,
Mes hommes
Marseille, Toulon, le Midi,
Mes hommes
Ils marchent avec insolence
Un petit rien dans la hanche
Ça ressemble à une danse
Mes hommes
Ils ne m'appellent Madame,
Mes hommes
Mais, tendrement, ils me nomment
Patronne
Ils se soumettent à ma loi,
Je me soumets à leur loi,
Que c'est doux d'obéir
A mes hommes
Tout d'amour et de tendresse,
Mes hommes
M'ont fait une forteresse,
Mes hommes
Non, vous ne passerez pas
C'est à eux, n'y touchez pas
Ils sont violents, quelquefois
Mes hommes, mes hommes
Ils se sont fait sentinelles,
Mes hommes
Ils pourraient être cruels,
Mes hommes
Ils me veillent, comme moi
Je les veille quelquefois
Moi pour eux et eux pour moi,
Mes hommes
Quand naissent les premières feuilles
D'automne
Quand le chagrin se fait lourd,
Mes hommes
Vont se mettre, sans un mot,
Debout, autour du piano
Et me disent tendrement
Patronne, patronne
C'est fou comme ils sont heureux,
Mes hommes
Quand le son du piano noir
Résonne
Ils vont faire leurs bagages
Et on reprend le voyage
Faut qu'ils voient du paysage,
Mes hommes
Quand descend la nuit furtive,
Mes hommes
A pas de loup, ils s'esquivent
Personne,
Ils vont chasser dans la nuit
Bergers, gardez vos brebis
Qui ont le goût et l'envie
Des hommes, des hommes
Car, de la blonde à la rousse,
Mes hommes
Ils vont coucher leur peau douce,
Mes hommes
Et repartent dans la nuit,
Courtois, mais pas attendris
Quand ils ont croqué le fruit,
La pomme
Ils reviennent au matin,
Mes hommes
Avec des fleurs dans les mains,
Mes hommes
Et restent là, silencieux,
Timides, baissant les yeux
En attendant que je leur
Pardonne
Ils ont installé mon lit,
Mes hommes
Au calme d'une prairie,
Mes hommes
Je peux m'endormir à l'ombre
Ils y creuseront ma tombe
Pour la longue nuit profonde
Des hommes, des hommes
Pas de pleurs, pas une larme,
Mes hommes
Je n'ai pas le goût du drame,
Mes hommes
Continuez, le regard fier,
Je serai là, comme hier
Vous devant et moi derrière,
Mes hommes.