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Elle est venue un peu tard dans ma vie. Je suis loin de tout connaître d'elle ; j'ai envie de la découvrir peu à peu, comme si elle était encore vivante. Sa voix, d'abord : elle a un calme rare, dont on dirait qu'il vous regarde droit dans les yeux, et qui met du silence dans son piano. Un calme qui contient une fièvre : elle sait s'emporter, tout en gardant l'élégance de ne pas dévoiler l'étendue de sa colère, de ses blessures, de parler de l'horreur tout en n'en parlant pas. Dans Le mal de vivre, dans Mes insomnies, il y a toujours une éclaircie. Et puis ses mots, leurs parfums d'herbe et de mousse...Au bois de Saint-Amand résonne de rires, du bonheur de l'instant. On sent la forêt, on voit une femme marchant pieds nus... Et puis ses notes, d'une grande précision, comme des lames, et parfois caressantes, et parfois laissant entrevoir quelque chose de sauvage... Entre sa voix, ses mots, ses notes, il y a une alchimie. Aucun décalage entre ce qu'elle dit, et ce qu'elle dit mélodiquement : c'est rond, homogène. Elle et son piano, c'est un duo d'amour. On y entend que c'est une femme de plaisir, que l'amour, chez elle, c'est aussi l'amour de la sensualité. Elle chante  " je n'ai pas la vertu des femmes de marin ", mais c'est elle le marin, elle la vagabonde. C'est la beauté de sa féminité : elle est libre. Quand elle chante, elle est maître du temps. Nous, pas toujours. Elle retient les notes, les suspend, les prolonge. Le temps, quand on chante, on l'orchestre, mais parfois, on ne sait pas ce qui se passe. Elle, j'ai l'impression qu'elle sait. Il y a dans son chant la plénitude de l'instant partagé entre elle et nous. On vient dans son histoire, elle nous accompagne dans la nôtre, parfois dans l'inconnu de nous. Et ce n'est jamais impudique. Je ne me vois pas interpréter Barbara, même si je la chante chez moi... Je préfère la découvrir, regarder resplendir l'étrange beauté de son visage, de son animalité, de sa noblesse.
 
Daphné  ( Chanteuse )